- Installation de sens sous les pas et exposition d'une calligraphie "|¨ΞΉTlΧ " avec le groupe de ΎΫ GOCOO(Taiko - Tambours traditionnels Japonais), DJ Domino, DJ Mike Maguire, à la Liquid Room, Shinjuku, Tokyo :
Installation de sens sous les pas :
J'écrivis sous eux. En deux cassé. Au travers de leurs piétinements. Frénétique. Un mot disparaîtra toujours après quelques lignes. C'est sa promesse.
Au fur et à mesure du rythme débouclant la diction, j'y perds le fil. Pouls.
Andre Cadere, dans les années 1970, allait déposer en guise d'installation une barre de bois ronde dans l'exposition d'autres artistes.
Sous les non pas : des on-dits. A l'acte d'installer lui-même qui disparaît dans la foule oublieuse, sculpture sans être un objet dur, la repliqua d'un phallus (phallos se dit en latin fascinus).
Certains, artistes ou regardeurs, demandent à l'oeuvre qu'elle impressionne (imprime), qu'elle fascine. La question n'est sans doute pas de remettre en cause cette névrose ancestrale, cependant.
Ce socle que l'art moderne interrogea soudain autour du début du siècle dernier ; Ces sculptures qui s'écrasent ensuite comme 10 x 10 Altstadt Copper Square ou Fall de Carl Andre, Sea Lava Circles de Richard Long, 15 untitled works in concrete de Donald Judd, les earthworks de Robert Smithson ou même 7000 Oaks de Joseph Beuys (Documenta 7) ou dernièrement 2,146 stones Monument Against Racism de Jochen Gerz à Sarrebrück (1990-93), on y trébucherait : une modernité détumescente?
Ovide, dans son Art d'aimer stipule : Acrior est nostra libidine plusque furoris habet (Le désir des femmes est plus vif que le nôtre et comporte plus de violence et d'égarement).
Tel aura été le thème de cette anachorèse.
"Car il y a aussitôt deux corps chez celui qui se met à parler et qui devient
language : un corps sublime posé "orthographiquement" sur un corps obscène."
Pascal Quignard, in Le sexe et l'effroi, Folio, 1994.
Une calligraphie intitulée "|¨ΞΉTlΧ " (12 mètres sur 4 mètres - encre noir sur papier Japonais) :
Ce travail se voulait une catachrèse sur le son, le langage, la foule, l'artificialité, l'objectif et la mort.
Les deux premiers et les deux derniers Kanji sont (suivit de leur sens respectifs) :
- | [L
E, δέ, ±, δ, = arc (archerie , violon)]
- ¨ [έέ = oreille]
- l [Άρ, ΠΖ, Ζ, Ιρ = (n) homme ; personne ; humain ; genre humain ; gens ; individus ; personalité ; homme de talent ; adulte ; autre personne ; messager ; visiteur]
- Χ [ ½ί, Θ.ι, Θ.·, ·.ι, ½θ Β.ι, Θθ Ρ’ = faire ; changer ; fabriquer ; bénéficier ; être utile ; réussir ; essayer ; pratiquer ; coût ; servir à ; bon ; avantage ; il en résulte ]
Tandis que les trois kanji du milieu sont respectivement :
- Ξ [©,Π = feu]
- Ή [¨Ζ, ¨ρ, Λ = son ; note]
- T
Chaque kanji peut être lu (tel un mot à part entière) avec les kanji qui le côtoye de la manière suivante :
- |+¨ = X [ r ~ β.ίι β.ή δΝ.Έ = stop ; cesser ; encoche servant à attacher la corde d'un arc]
- ¨+Ξ = γΤ [Π©θ = lumière]
- Ξ+Ή+T = ΰ [¨±· = allumer un feu]
- T+l = Tl [ζΆρ = chasseur ; archer]
- l+Χ = lΧ [Άρ’ = (n) travail humain ; art ; artificialité]
"(...)Phoibos Apollôn l'entendit et, du sommet Olympien, il se précipita, irrité dans son coeur, portant l'arc sur ses épaules, avec le plein carquois. Et les flèches sonnaient sur le dos du Dieu irrité, à chacun de ses mouvements. Et il allait, semblable à la nuit.
Assis à l'écart, loin des nefs, il lan;ça une flèche, et un bruit terrible sortit de l'arc d'argent. Il frappa les mulets d'abord et les chiens rapides ; mais, ensuite, il per;ça les hommes eux-mêmes du trait qui tue. Et sans cesse les bûchers brûlaient, lourds de cadavres. Depuis neuf jours les flèches divines sifflaient à travers l'armée.(...)" Homère, l'Iliade, chant premier, vers 43.
(traduction de Leconte de Lisle, 1818-1894)
"(...)Ainsi parlaient les Prétendants ; mais le subtil Odysseus(Ulysse), ayant examiné le grand arc, le tendit aussi aisément qu'un homme, habile à jouer de la kithare et à chanter, tend, à l'aide d'une cheville, une nouvelle corde faite de l'intestin tordu d'une brebis. Ce fut ainsi qu'Odysseus, tenant le grand arc, tendit aisément de la main droite le nerf, qui résonna comme le cri de l'hirondelle.(...)" Homère, l'Odyssée, chant XXI.
(traduction de Leconte de Lisle, 1818-1894)
L'instrument à sons, fait de boyaux ou de nerfs tendus sur une peau de vache, c'est la cithare (kithara) d'Hermes, qui l'offrit à Apollon, qui à son tour l'utilisa pour décocher les traits de son carquois "à travers l'armée" dans l'Iliade. Pour les Anciens Romains, la cithare comme la lyre, les instruments à cordes sont des arcs, et la flèche comme la note juste part droit et tue la proie si le son de la corde alors relachée chante "pareille à l'hirondelle pour ce qui est de la voix"(Pascal Quignard, in La haine de la musique, Folio, 1996).
Symboliquement, les musiciens sont des archers, et la musique, une chasse. Les tambours, les cors(cornes), eux, projettent dans la panique, et servent à la battue, l'appel à la mort.
Je ne fus qu'à moitié surpris d'apprendre que le Kanji | signifie communément "Arc", mais peut aussi signifier "violon".
N'est-il pas étonnant qu'en Fran;çais, l'instrument fait de crin de cheval servant à "jouer" du violon s'appelle d'ailleurs l'archet?
Cette calligraphie est une commande,
je la considère extérieure à mon travail.